Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

science fiction - Page 13

  • Cypher (2003)

    Un film de Vincenzo Natali

    3561573981_20f3d75dde_m.jpgMême si je ne pense pas que ce film soit "indéfendable", il reste tout du moins mésestimé par le plus grand nombre. Il s’agit s’un trip très construit, à cheval entre espionnage, SF et thriller paranoïaque, dans lequel Morgan Sullivan (Jeremy Northam) incarne l’homme ordinaire qui veut changer de vie : il devient alors espion industriel pour la firme Digicorp, mais ses missions sont, comment dire, loin de celles d’un James Bond, jugez plutôt : il se rend à des conférences pour enregistrer des discours sans intérêt... On se doute rapidement qu’il est utilisé.

    Opérant une variation chromatique tout au long du film, passant d’un ensemble désaturé qui s’agrémente peu à peu de couleurs, pour finir dans une apothéose bariolée, Vincenzo Natali construit son film par petites touches impressionnistes. Le moment du premier véritable envahissement de couleurs à l’écran accompagne ainsi la révélation conjointe, pour le personnage principal comme pour le spectateur, d’une première vérité, dans ce monde où l’information semble toujours cachée. De plus, le glissement progressif d’un genre à l’autre suit cette variation chromatique, et la découverte progressive de la vérité par Sullivan. Même si le début du métrage fait invariablement penser à un Matrix du pauvre, il ne faut pas s’y fier. Derrière un budget qu’on n’imagine certes pas à la hauteur des ambitions du cinéaste -les effets spéciaux sont très visibles-, le film déroule sa trame avec une droiture et une absence d’ironie qui le sert bien. Le jeu des doubles, illustré ici jusqu’aux antagonismes des multinationales qui s’affrontent, donne un léger vertige par la richesse des virages scénaristiques, qui s’estompera cependant bien vite, n’ayez crainte. La dernière partie, qui démêle le vrai du faux, est jouissive pour qui y est réceptif (j’en suis, évidemment).

    Lucy Liu est bien castée dans un rôle ambigu, personnage coloré et atypique dans un univers formaté où l’on ne parle que de données échangées, volées, à prendre... Jeremy Northam, quant à lui, a la bonne tête et les manières maladroites de l'homme dépassé par les événements, mais qui jouit en même temps de ce revirement dans sa vie. Northam reste, malheureusement, trop discret dans le paysage cinématographique.

    Ne se prétendant pas autre chose qu’un divertissement, le film surprend par sa foule d’idées, dont certaines sont franchement casse-gueule -la citation de La mort aux trousses, transposée de nuit, et l’apparition qui s’en suit-, mais qui organise tranquillement sa petite réussite, en sachant bien qu’il ne révolutionne pas le genre. Je rapprocherais volontiers Cypher d’un Passé Virtuel (Josef Rusnak, 1999), voire d’un Planète hurlante (Christian Duguay, 1996), deux films qui n’ont pas la réputation qu’ils méritent. Sans être des chefs d’œuvres évidents, ils sont des réussites, tant formelles que scénaristiques, et font du bien pour leur fraîcheur.

  • Rollerball (1975)

    Cliquez sur l'image pour accéder à la chronique de Rollerball (Norman Jewison, 1975) :

    3449058055_dc740a6fea_m.jpg

  • Le secret de la planète des singes (1970)

    Un film de Ted Post

    3271727135_3223dcd67f_m.jpgLa saga Planète des singes se pose quand même là dans l’histoire de la science-fiction au cinéma. Partant du bouquin de Pierre Boulle, le premier volet est mythique, tellement populaire que le coup de théâtre final est dévoilé dès la jaquette du dvd ! Cas assez rare pour le signaler...

    Au vu du grand succès remporté par le premier film, le producteur Arthur P. Jacobs met vite en route une suite. Plusieurs problèmes se posent : Charlton Heston est réticent et va minimiser autant qu’il peut sa participation au Secret... ; autre problème, Jacobs ne réussit pas à avoir Franklin J. Schaffner à la réalisation, ni Pierre Boulle et l’immense Rod Serling au scénario, qui n’arrivent pas (s’opposent ?) à aboutir à un scénario valable. Soit toutes ses composantes qui ont fait la réussite incontestable du premier film, tant artistique que financière. Même l’acteur qui deviendra la pierre angulaire de la saga, Roddy McDowall, dans le rôle de Cornelius, est remplacé par l’acteur David Watson pour cause d’indisponibilité. Qu’à cela ne tienne, Ted Post, réalisateur TV, va avoir en charge la mise en scène. Un exercice sans grande surprise, loin derrière les audaces formelles et la vision indéniable de celle de Schaffner, pas désagréable pour autant, même si il manque clairement de génie. La découverte du New-York en ruines est vraiment sympathique, et le dernier acte est tellement énorme (à tous points de vues) qu’on ne peut parler de ratage. On devra plus tard à Ted Post Magnum Force, 2ème épisode de la non moins célèbre saga Inspecteur Harry, où il s’en tire avec tous les honneurs (décidément, un spécialiste des n°2).

    J’aime tout particulièrement ce Secret..., qui voit James Franciscus (choisi pour sa ressemblance avec Heston), arrivé sur la planète en suivant les traces de Taylor, partir à sa recherche en compagnie de la mimi Nova. Le soin laissé encore une fois à l’imagerie, très cinégénique, de ces primates parlants dûment cuirassés, ne me lasse jamais. De plus, on a dans cet opus un usage plus poussé des trois races de singes en présence (gorilles guerriers ou gardiens, orangs-outangs sages, en haut de la pyramide du pouvoir et de la religion, et chimpanzés qui représentent le peuple), ce qui apporte un approfondissement bienvenu sur les rapports de force dans la société de la planète des singes. Une séquence de tabassage des gorilles sur des chimpanzés amène même un parallèle évident avec les débordements policiers de 68, année révolutionnaire. On n’échappe cependant pas à une certaine redite, surtout au début du métrage : les 5 premières minutes sont reprises du premier film, et les premières impressions de Brent (James Franciscus) ne sont qu’un résumé de celles éprouvées par Taylor précédemment. La musique composée pour l’occasion par Leonard Rosenman est également à cent lieues du bijou aux sonorités tribales de Jerry Goldsmith, mais sait néanmoins faire preuve d’une sobriété efficace (certaines scènes ne sont que très peu sonorisées, ce qui donne un côté plus brusque aux événements).

    Beneath the planet of the apes peut donc aujourd’hui garder la tête haute, illustrant bien la peur du conflit atomique comme nombre de péloches sci-fi de la décennie précédente. Sa secte d’adorateurs d’une sorte de phallus doré est constamment sur le fil du ridicule -notamment grâce à des costumes pyjama-style et un Jacques Villeret américain qui préfigurent le nanardesque La soupe aux choux, sans jamais cependant y sombrer vraiment. Et si la guerre primates-humains qui se prépare est confuse -comment les singes connaissent-ils l’emplacement de la base des hommes radioactifs ?-, elle laisse place à un spectacle crépusculaire qui fait plaisir à voir, bien qu'un peu mou. La suite de la saga sera plus maladroite, malgré un troisième épisode délibérément orienté comédie assez plaisant, et devra se débrouiller à chaque fois avec moins de budget que son prédécesseur. Elle n’en perdurera pas moins, et c’est plutôt l’infâme remake de Tim Burton qui donna à l'orée des années 2000 un coup fatal à la reprise de cette histoire ô combien porteuse.

  • Spriggan (1998)

    Un film de Hirotsugu Kawasaki

    3238661172_defc0a6db4_m.jpgSpriggan fait partie de ces films d’animation japonais qui, bien que (ou à cause de) leur absence sur les écrans français, ont bénéficié d’un buzz important et ont vu leur réputation être surévaluée. Ici, cette surévaluation est également due à Katsuhiro Otomo, mangaka reconnu (Domû, rêves d’enfants et le scénario de Mother Sarah) et surtout créateur d’Akira ; il occupe sur Spriggan le poste de superviseur.

    Résumer le propos de Spriggan est assez difficile, mais allons-y en deux mots : Une agence secrète travaille à la découverte et la préservation du savoir d’une société très ancienne. Leurs agents sont les Spriggan. Lors de la mise au jour de l’Arche de Noé sur le mont Ararat, le meilleur de ces agents, un lycéen du nom de Yu, est appelé sur les lieux pour empêcher la CIA de s’approprier la découverte.

    On voit, après ces quelques lignes, la dimension casse-gueule que prend cette histoire assez complexe : entre anticipation, espionnage et fable fantastique, le film ne fait aucun choix et décide de traiter tout cela en même temps, sur une durée d’1h30. On a donc un premier problème avec le résultat final qui nous est présenté : il ne sait pas trop sur quel pied danser. Dernier point important sur la tonalité du film, il est conçu avant tout comme un film d’action tout juste bon à accumuler des séquences de courses-poursuites et d'explosions en tous genres. Le fil rouge du récit, cette mystérieuse Arche de Noé aux références bibliques, n’est d’ailleurs pas suffisante pour justifier tous ces éléments périphériques, étant elle aussi sacrifiée par le traitement narratif de l’ensemble.

    Les scènes d’action sont certes bluffantes. La course-poursuite au début du film rivalise de nervosité et d’ampleur avec certains des meilleurs films live dans le genre. L’animation du métrage est d’ailleurs son vrai point fort : soignée, alternant les plans et les mouvements de caméra comme un film de prises de vues réelles, elle rappelle un petit chef d’œuvre sorti la même année, Jin-Roh, la brigade des loups (réalisé par Hiroyuki Okiura), qui produit le même effet tout à fait étrange : à partir d’un moment, on ne sait plus qu’on regarde un film d’animation. Cette sensation est toujours extrêmement rare car le principe même de l’animation en fait une œuvre réflexive. On est toujours devant une traduction / appropriation / recréation du réel. Ici, cette recréation calque tellement l’impression de réel que c’en est confondant. Découle de là un autre problème majeur, c’est qu’en étant si réaliste dans les mouvements des personnage et le rendu des décors, les scènes typiquement fantastiques semblent arriver comme un cheveu sur la soupe, à l’image de ces dinosaures (?!) à la poursuite de Yu, à l’intérieur de l’Arche de Noé. Le propos qui en découle, pseudo-écolo, ne trouve pas sa place dans le film, et n’est en tous cas amené avec aucun tact ; on ne peut échapper au ridicule lors de cette séquence.

    Finalement, ce qui nuit peut-être le plus à Spriggan, c’est Katsuhiro Otomo. N’étant pas qu’une caution scénaristique ou visuelle, on retrouve dans Spriggan des éléments constitutifs d’Akira tellement similaires qu’on a l’impression de voir une histoire parallèle au chef d’œuvre post-apocalyptique du mangaka/cinéaste japonais. Entre les pouvoirs télékinésiques, les (faux) jeunes garçons qui dissimulent leur (vraie) vieillesse et une esthétique futuriste, le tout constitue un patchwork mal assemblé, qui aboutit à un fourre-tout scénaristique assez faible. Si sa qualité technique n’est pas à mettre en doute, on ne peut parler de réussite, et on conseillera plutôt aux amateurs de revoir le bon Jin-Roh.

  • Un film, une séquence : Sunshine (2007)

    La mort de Kaneda

    3181029295_b00c0a8f74.jpg?v=0

    Sunshine nous conte l’aventure d’un groupe d’astronautes sur le vaisseau Icarus II missionnés de réanimer le soleil mourant, à l’aide d’une charge nucléaire massive, alors q’une première mission a échoué quelques années auparavant, ne laissant aucune trace. La mission est déjà signifiée comme très périlleuse, alors que la captation du signal de détresse  du premier vaisseau Icarus est captée ; l’équipage décide de changer sa course, principalement pour récupérer la charge nucléaire sur Icarus I, ce dans le but d’avoir une chance supplémentaire de mener à bien la mission.
    La séquence qui nous intéresse se trouve entre la 26e  et la 40e minute du film, formant un bloc d’un quart d’heure où progression musicale, dramatique, cinématographique vont de concert pour aboutir à la mort du commandant Kaneda.

    On peut diviser la séquence en deux parties : une première de la préparation de la sortie dans l’espace jusqu’à la réparation du premier panneau solaire, et une deuxième de l’embrassement du jardin à oxygène jusqu’à la mort de Kaneda.

    3181862116_5143cea3e1.jpg?v=0

    Dans la première partie, Kaneda (Hiroyuki Sanada, excellent dans la trilogie Ring) et Capa (Cillian Murphy) se préparent pour faire une sortie dans l’espace afin de visualiser les dégâts causés par le changement de cap du vaisseau. Entourés par un blanc immaculé et animés de mouvements qu’on pourrait croire filmés au ralenti, les deux astronautes revêtent leurs lourdes combinaisons. Dans cette scène, deux éléments nous sont clairement donnés : premièrement, la prévision d’une sortie dans l’espace s’avère dangereuse, au vu de la taille des combinaisons (et donc des protections nécessaires à la survie des deux personnages) et des nombreux paramètres à vérifier. Deuxièmement, ils ne peuvent être autonomes  à aucun moment de cette phase, étant aidés physiquement par un/une de leur coéquipier. Leur relation doit donc être basée sur une confiance absolue, qui sera mise à mal par la suite. Une fois dans l’espace, ils seront livrés à eux même, même si ils sont constamment reliés par un dispositif vidéo qui permet à l’équipage de suivre leur avancée. Dans cette première période, les plans sont relativement longs, s’attachant à montrer la méticulosité de la préparation. La musique est alors simplement constituée d’une pulsation électronique, et de quelques arrangements avant-gardistes (musique industrielle) à base de bruits métalliques et d’alarme. Une fois la première manœuvre réussie, consistant en la réparation d'un des panneaux solaires sur une des parois du vaisseau, un soulagement soulève l’ensemble de l’équipage ; il sera de très courte durée. Sourires et éclats de voix s’offrent effectivement un contrepoint total dans le plan qui suit, avec un dégât beaucoup plus grave que la menace immatérielle qui planait jusqu’alors : l’embrasement du jardin à oxygène, qui malgré certaines précautions n’a pas pu être prévu. Dans la précipitation, l’équipage s’était mis d’accord sur l’abandon de certains équipements ; personne n’a pris assez de recul pour envisager la chaîne d’événements tragiques que ce choix allait entraîner.

    3181029617_32c3bb9d95.jpg?v=0

    La deuxième partie de la séquence, montrant à l’image le caractère imprévu et dévastateur de la perte du jardin à oxygène, vu auparavant comme un petit paradis aux teintes vertes chatoyantes, devient un véritable enfer où le feu, incontrôlable, est devenu maître. L’approche générale en terme de mise en scène est chamboulée : plans brefs, musique plus rapide, imageant le rythme cardiaque plus élevé de tout l’équipage et principalement de Kaneda, qui prend dès cet instant la résolution secrète de ne pas revenir à bord du vaisseau, autant pour finir les réparations nécessaires à la survie du reste de l’équipage, et de succomber à la fascination qu’exerce le soleil : le voir de plus près et sans filtres, faisant écho aux séances de contemplation du début du film. La relation qu’entretiennent l’équipage avec ce soleil est vraiment intéressante car on y voit une dimension mystique : dans le monde technologique et calculé du futur de 2057, le soleil semble receler la dernière part de mystère, de magie, et peut s’apparenter à l’image d’un dieu. Ainsi, quand Kaneda décide de reste sur le toit du vaisseau pour avoir une ultime confrontation avec le soleil divin, l’opérateur Searle a une réaction tout à fait extraordinaire : il demande dans le casque de Kaneda « Qu’est-ce que vous voyez ? » pour avoir une part de cette expérience hors du commun. Mais on ne peut la partager qu’en offrant sa vie, et non pas en restant à bord du vaisseau. Kaneda restera silencieux à tous les appels radio de l’équipage.

    3181028971_53a126db3c.jpg?v=0

    Le montage de cette deuxième partie s’avère virtuose, alternant dans un véritable ballet les vues de l’intérieur du vaisseau, des écrans de contrôles constituant un split-screen naturel, de l’intérieur du casque de Kaneda et Capa, ainsi que du jardin à oxygène qui va partir en fumée. Les enjeux, énormes, et la prise de décision rapide, font de cette séquence un véritable feu d’artifice émotionnel, que la musique, montant en intensité, accompagne en symbiose. La performance de Hiroyuki Sanada, résolue, fascinée et forcément extrémiste, est bluffante et balaye toutes les autres données de la séquence. Entendre son râle étouffé par la retransmission radio, juste avant la mort de son personnage, reste longtemps gravé dans la mémoire et constitue sans aucun doute le moment marquant du film dans son entier. Il reste par la suite plusieurs moments de bravoure, mais cette séquence de Sunshine est une réussite à tous points de vue : un grand moment à (re)voir. Et, pour ceux qui ne connaisse pas le film, une invitation à le voir séance tenante !

    3181862474_eddb4508b7.jpg?v=0